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Premiers Doutes - Chapitre 54

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Chapitre 54 - Game over

54

Game over

Dans une salle noire hexagonale, les deux écrans qui scintillaient sur l’un des six murs, renvoyaient respectivement un plan d’ensemble en plongée de la salle A31, remplie de rêveurs prisonniers et un gros plan de deux jeunes adultes enlacés. Ces derniers semblaient tristes et heureux à la fois : heureux d’avoir retrouver la réalité mais effrayés par le visage de la vérité.

Un siège pivota dans le noir. Le corps d’un homme se découpa en contre jour alors qu’il passait devant les écrans et une console riche en boutons lumineux pour aller se placer à côté d’un jeu d’échec en 3 dimensions.

L’homme tourna sans bruit autour des six plateaux transparents du jeu d’échec, superposés les uns sur les autres à l’aide d’une unique tige cristalline.

Ses yeux qui brillaient dans le noir sous l’effet des quelques rayons lumineux provenant de la console et des écrans, étudiaient attentivement les pions placés sur l’avant dernier plateau supérieur.

L’homme respira bruyamment puis revint s’asseoir sur son énorme siège. Seule sa main gauche posée près des boutons aurait été visible pour quelqu’un placé en arrière du siège, face à la lumière bleutée des écrans.

Comme une tarentule s’avançant vers sa proie, elle glissa sur la toile qu’elle avait tendue. D’un geste précis, elle sauta finalement sur le bouton qui clignotait rapidement dans la pénombre.

- Dommage mon cher, c’était un bon coup, malheureusement cette tentative désespérée était vouée à l’échec et vous le saviez ! Votre défaite est inéluctable ! exulta l’homme.

- Échec et mat ! rajouta sa voix rugueuse tandis que sa main gauche appuyait sur le bouton vert où se détachait en blanc lumineux les lettres : Reality Overthrow/Reverse On Looker.

L’écran de gauche montra aussitôt l’irruption des quatre gardes dans la salle A31. Ils couraient en direction du couple qui ne bougeait pas, profitant des derniers instants qui lui restait.

L’écran de droite montrait toujours en gros plan les deux victimes de la tarentule. La piqûre empoisonnée avait fait son effet et la tarentule emportait ses victimes pour les envelopper dans un cocon qu’elles ne réussiraient plus à déchirer.

Les gardes semblaient avoir du mal à séparer les victimes encore enlacées.

Finalement, l’homme redevenu silencieux appuya sur le bouton Clear Screen et les deux écrans se vidèrent pour afficher chacun un grand rectangle bleu vide.

L’homme se releva et vint se placer entre le siège et la table où étaient posés les six plateaux de cristal du cyberhexéchec. Sa main gauche s’empara des deux seuls pions placés sur le cinquième plateau en partant du plus bas et les déposa sur le plateau du bas au milieu de nombreux autres pions.

L’homme tourna autour du jeu d’échec pour admirer la disposition des pions en cette fin de partie mémorable. Ses yeux brillèrent alors qu’il fit face à la console lumineuse. Ils ne pouvaient se détacher de la multitude de pions placés sur le plateau du bas alors que les autres plateaux n’étaient occupés que par que quelques pions.

Un sourire de satisfaction totale rayonnait sur son visage.

Sa main droite ramena alors vers sa bouche un petit micro sans fil.

- Ici Player A : vous avez perdu Player B ! Mais je dois le reconnaître, vous vous êtes bien défendu ! Je dois même dire qu’à un moment, j’ai bien cru que vos pions réussiraient à se libérer pour de bon de l’emprise du projecteur ! Mais voilà, on ne peut pas tout prévoir. C’est là d’où je tire tout le plaisir de notre petit jeu ! Je suis sûr que lorsque vous avez vu vos pions atteindre " la réalité " vous ne vous êtes pas douté une seule fois que j’avais recréé en secret un nouveau micro-monde virtuel, véritable clone du " dortoir " de la base. Vous avez cru envoyer vos petits protégés dans la réalité mais juste au moment de leur transfert j’y inséré mon micro-monde et ils s’y sont heurtés comme je l’avais prévu ! Vous n’avez alors rien pu faire pour empêcher mes Transféreurs logiciels d’intervenir. Quel qu’ait été votre plan, vous n’avez pu le mettre en oeuvre !

Votre pion numéro deux va perdre un niveau, quant au pion numéro un, il retourne d’où il est venu, vous devez accepter ce transfert, c’est la règle et vous la connaissez aussi bien que moi, n’est-ce pas ?

- Ici Player B : je la connais, lâcha laconiquement la voix dans le haut-parleur. Pourtant elle ne portait en elle aucune trace d’amertume. Ce n’était pas la voix d’un perdant.

- Je suppose que vous voudrez rejouer à nouveau la liberté de vos deux pions. Est-ce que je me trompe ?

- Voilà, je ne suis pas vraiment sûr de vouloir rejouer cette fois ! Après tout, je crois bien que ce que je voulais est arrivé et en fin de compte, mon cher Player A, je crois qu’au fond c’est vous qui perdez au jeu !

- Mais que voulez vous dire Player B ? Player B ? Schéma, répondez ! Entendez-vous que j’ai perdu un partenaire de choix ?

*

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