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Premiers Doutes - Chapitre 56

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Chapitre 56 - Bon sang, quel rêve !

56

Bon sang, quel rêve !

Raphaël Obéron, en reprenant lentement ses esprits, tout habillé au milieu de son lit, sentit aussitôt que quelque chose ne tournait pas rond dans sa chambre.

- Bon sang ! Mais ça sent le brûlé, ici ! fit-il en sursautant sur son lit.

Un paquet de feuilles tomba à terre alors qu’il écartait soudain, pris de panique, des morceaux de fils électriques et des débris de plastique et de métal éparpillés sur lui et sur le lit.

Quel réveil stressant ! À peine sorti d’un étrange rêve, Raphaël Obéron constatait que son digitaliseur venait d’exploser pour une raison inconnue !

L’écran mural du salon était en partie noirci par l’explosion. Des morceaux de plastiques épars au milieu de la moquette mouillées dégageaient une odeur puissante et désagréable.

Obéron constata amèrement qu’il ne pouvait plus rien faire, le sprinkler du plafond avait joué son rôle anti-incendie. Obéron n’en revenait pas qu’une explosion et qu’un début d’incendie ne l’aient pas une seule fois réveillé !

Il regarda autour de lui une dernière fois pour se rassurer mais il était évident qu’il ne risquait plus rien maintenant.

Il avança vers son ordinateur domestique et le contact de la moquette entièrement mouillée à travers ses chaussettes le refroidit brutalement.

Raphaël se demanda comment cela avait bien pu arriver et presque aussitôt grimaça à l’idée de ce que les réparations allaient lui coûter ! Il jeta un regard évaluateur sur ces dégâts inattendus.

Sa chambre-salon était à moitié carbonisée et complètement trempée.

Soudain, à l’évocation de l’eau, Obéron en vint à craindre le pire pour son matériel informatique.

Par on ne sait quel miracle, seuls le digitaliseur, l’imprimante laser et le joystick étaient détruits ; l’unité principale de GAR, les claviers de l’unité de communication et les quatre écrans étaient quasiment intacts. L’écran du salon serait sûrement à remplacer mais il semblait encore fonctionner ! En effet, GAR semblait être resté sous tension durant toute la nuit et des images dansaient en même temps sur les quatre écrans. Toutes ces images qui défilaient, donnaient la nausée à Raphaël. Mais avant de les arrêter, il comprit pourquoi elles lui étaient si familières : Toutes ces images ne provenaient pas de la télévision comme il l’avait d’abord cru mais de son imposante bibliothèque d’images. GAR avait donc quand même souffert de cette explosion mystérieuse.

Parmi elles, Obéron reconnut les photos du livret d’antécorrespondance qui gisait à terre à côté du lit. Il y avait bien sûr ses propres dessins, faits par ordinateur à l’époque où il avait encore le temps de se consacrer à l’illustration du fanzine de science fiction du club Hypernova.

Enfin, il reconnut également les illustrations scientifiques de ses cours. Parmi elles, notamment, celles qui accompagnaient le dossier " CLONAGE DES CELLULES NERVEUSES EXTRA PYRAMIDALES ".

Dans la folle danse des images, Raphaël identifia les deux portraits de Crystaléa Lowen-Soissanth, ou du moins les deux photoroïdes que sa correspondante mystérieuse lui avait envoyé en prétendant qu’il s’agissait réellement des siennes.

Toutes ses images le forçaient à se rappeler de quelque chose d’incroyable et de troublant : son mystérieux rêve.

C’était étrange à quel point cela prenait l’allure de souvenirs réels et pourtant Raphaël Obéron en était maintenant certain, ces images lui rappelaient son rêve parce que son rêve était né d’elles. Son inconscient avait utilisé toutes ces images gravées dans sa mémoire et en avait fait une histoire étrange. Raphaël essaya de se rappeler de son rêve.

- Essayer de l’analyser. Mais un rêve aussi étrange peut il avoir un sens ? se demanda Obéron perplexe.

Il repensa alors à cette histoire que lui avait raconté Franck York. C’était celle d’un homme qui avait rêvé qu’il était aristocrate sous la révolution française pour avoir reçu sa barre de rideau sur le cou. L’incident était arrivé au petit matin, là où le sommeil paradoxal est le plus long et il avait rêvé à rebours toute une aventure jusqu’à ce qu’il se fasse " finalement " guillotiner !

Il devait en être pour Raphaël comme pour cet homme. Ce rêve étrange avait dû être déclenché par ces événements bizarres. Raphaël admit que ce rêve n’était que la seule mise en garde possible qu’avait trouvé son inconscient pour l’avertir du danger.

Oui, c’était sûrement cela ! Comment expliquer sinon un rêve aussi étrange. L’explosion, l’eau et toutes les images qui défilaient sur le mur avaient été intégrées à rebours dans ce rêve mémorable.

Raphaël Obéron allait enfin pouvoir raconter quelque chose d’incroyable à ces amis !

N’était-ce pas incroyable après tout, d’avoir rêvé d’être transporté vers le monde imaginaire de DREAMWAR et d’y rencontrer Crystaléa Lowen-Soissanth en chair et en os ?

N’était-ce pas stupéfiant d’imaginer ensuite que le monde THAGAMA 74 n’était qu’un rêve pour les survivants de l’apocalypse. Et que cet autre monde n’avait d’autre fonction que de permettre à des clones de servir à la survie d’astronautes prisonniers dans leur vaisseau !

Incontestablement, imaginer que le Rêve assisté par Ordinateur, dont parlait si sérieusement Gérald, avait transformé en cauchemar les vies de millions d’individus n’était-ce pas, là encore, la preuve que les rêves resteront encore pour longtemps insondables ?

À tout réfléchir, Raphaël s'avisa que les propos de son collègue avaient certainement aussi une part de responsabilité dans son rêve.

Soudain, la sonnerie du Vidéophone dans la cuisine chassa des pensées d’Obéron toutes ces réflexions pseudo-philosophiques.

Après avoir juré comme un ours, pour s’être cogné le pied dans un des morceaux de fer qui gisaient à terre, il décrocha le combiné.

L’image de Franck York apparut sur l’écran.

Celui-là a un air moqueur, méfiance !

- Raphaël, je te téléphone pour deux raisons :

Primo, merci de m’avoir ramené chez moi hier. Sans toi, je ne sais pas ce que je deviendrais !

Secundo, pourrais-tu me donner une bonne excuse pour n’avoir pas été en cours ce matin ? Étant donné que tu n’as pas bu dans la soirée d’hier, j’aimerai bien que tu renouvelles mon stock d’excuses bidons !

Raphaël regarda le vidéophone avec des yeux ronds.

- Alors, Raphaël ? T’es malade ? On dirait pas ! Dans ce cas-là, pourquoi t’es pas venu faire cours ce matin ? Hum ?

- Quoi ? explosa Obéron. Mais quelle heure est-il ?

- Ben, midi pourquoi ! dit Franck qui s’attendait peut-être à une meilleure excuse.

- Tu ne vas pas me raconter que t’as eu une panne de réveil, n’est-ce pas ?

- Écoute Franck ! Ce serait trop long à te raconter ! De toute façon, on se voit ce soir au bar d’Hypernova, comme prévu, entendu ?

Et Raphaël Obéron confus raccrocha le combiné.

- Grand univers ! Comment allait-il expliquer au doyen du Mégacampus cet oubli ? Il n’avait pourtant pas bu la veille, alors… Bien sûr, se coucher à six heures du matin ne l’assurait sûrement pas de se réveiller le lendemain frais et dispos !

- L’explosion d’un digitaliseur ? Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire, Monsieur Obéron ? pensa Raphaël en imaginant la stupeur du doyen.

Mais après tout, je n’ai pas de compte à lui rendre, c’est moi le professeur ! Et Raphaël prit son cuir et sortit en toute hâte afin de ne pas rater cette fois le cours de l’après-midi.

*